L'axe du chaud, par Eric Le Boucher

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Chanbon
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L'axe du chaud, par Eric Le Boucher

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Article du Monde:
LE MONDE | 07.04.07 | 11h57 • Mis à jour le 07.04.07 | 11h57

Voilà donc que des pays méprisables - les Etats-Unis, la Chine, la Russie, l'Arabie saoudite - ont contesté les incontestables, lumineuses et alarmantes conclusions du gourou écologique mondial, le GIEC. Les rapports de ce valeureux Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat, véritable sauveteur de l'humanité étouffante et suante, sont faits en deux temps : des analyses scientifiques puis des conclusions synthétiques tirées par des "politiques" à destination des gouvernants et du bon peuple mondial. C'est ce deuxième texte que les énergivores pays ont contesté, bloquant sa publication vendredi 6 avril au matin.

Les vilains Chinois ont refusé que le texte affirme comme "très élevée" la menace que fait peser le réchauffement sur de nombreuses espèces d'animaux. Pas étonnant de la part de ces massacreurs de pandas ! Les Etats-Unis ont biffé les sorties du GIEC sur les "graves dommages économiques" que le réchauffement provoquera. Pas étonnant de la part d'un pays dont la vigueur de la croissance fait l'admiration de tous les économistes. Il y avait l'axe du Mal. Voilà l'axe du chaud ! Haro, Hulot !

On se moque. On se moque parce que nous sommes dans un monde médiatique qui tue les nuances alors que ces affaires de climat sont sérieuses mais hyper-complexes. Pour sensibiliser les opinions, les politiques du GIEC et les écologistes de métier veulent faire peur, et pour faire peur ils simplifient, voire ils en rajoutent. Qu'ont-ils besoin en effet de se prétendre économistes et de prédire des récessions aux Etats-Unis ? Pourquoi affirmer avec aplomb que 2 degrés de plus sont mauvais pour le commerce, alors qu'on observe sur le territoire de ces Etats-Unis un déplacement de l'activité vers le Sud et vers le soleil ? Dire que "ce seront les pauvres qui souffriront le plus du réchauffement" émeut nos coeurs sensibles. Mais c'est un truisme : les pauvres souffriraient aussi le plus d'un refroidissement de cette même planète tout simplement parce que - le monde est ainsi fait - ce sont les pauvres qui souffrent toujours le plus, quoi qu'il arrive !

On l'a dit ici, et on le redit : cette stratégie des écolos est désastreuse pour la cause écologiste elle-même. Les savants du climat feraient mieux d'affiner leurs études et de ne pas se faire militants. La politique n'a jamais fait bon ménage avec la vérité.

L'ancien ministre Claude Allègre doute encore de la cause humaine du réchauffement (Ma vérité sur la planète, Plon-Fayard). On ne sait. Mais il a raison de dénoncer l'écologie "de la peur et de l'anti-progrès". Les gouvernants feraient mieux de définir des politiques énergétiques efficaces, réalistes et économes plutôt que de signer les "pactes écologiques" des Hulot de la terre qu'ils savent pertinemment inapplicables.

Prenez la France. Cette France de Jacques Chirac (mais les suivants feront pareil) qui se prétend si exemplaire en matière de climat. Coïncidence instructive, la publication du rapport du GIEC a été précédée la veille par la remise d'un "avis" du Haut Conseil de la science et de la technologie sur la politique énergétique française au vert président Chirac.

La loi du 13 juillet 2005 a fixé les "orientations de la politique énergétique" de la France. Elles doivent "garantir sa sécurité énergétique" mais aussi "lutter contre l'aggravation de l'effet de serre". L'objectif concret est de diviser par quatre les émissions de CO2 d'ici à 2050. Les vingt professeurs et directeurs du Haut Conseil préviennent : "On n'y arrivera pas." Ils ne remettent pas en question l'objectif, contrairement à d'autres qui le jugent trop contraignant, mais ils dénoncent "opportunisme", " opacité", "incompétences" et, surtout, "incohérence" dans la mise en oeuvre. Les écologistes ne sont pas responsables de l'inefficacité devenue criante de l'Etat sur beaucoup de sujets, mais on ne peut s'empêcher de penser que leur pression politique et médiatique biaise la recherche d'une bonne politique énergétique économe et finalement écologique.

C'est évident en matière nucléaire, où les Verts sont en contradiction avec eux-mêmes : l'atome est la seule technologie disponible pour produire massivement de l'électricité sans émettre du CO2. Mais le Haut Conseil donne d'autres exemples : les subventions aux éoliennes font "propre", mais elles sont inutiles puisque ces appareils font, en France, double emploi avec l'immense parc nucléaire. Les OGM sont dénoncés par les écologistes français, mais, pour produire rapidement des plantes destinées à être transformées en carburants, la seule manière est de foncer sur les recherches génétiques.

"L'Etat doit veiller à ce que les économies de gaz à effet de serre soient évaluées de façon cohérente selon les principes économiques classiques", conclut le rapport. Autrement dit, la politique énergétique française doit cesser de vouloir répondre aux impératifs du coup par coup, de plaire aux uns et aux autres, sans cohérence d'ensemble. L'énergie devrait être "un grand projet national". Le gouvernement devrait mettre de l'ordre dans l'empilement des organismes de recherche laissés sans directives et il devrait créer une instance publique-privée "de réflexion et de prospective" qui, placée auprès du premier ministre, serait chargée de définir un pilotage global "éclairé". Ce serait sans doute plus utile que de promettre faussement de tout peindre en vert et de désorganiser l'économie.
Eric Le Boucher
Article paru dans l'édition du 08.04.07.
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